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Lettre d'Honoré de Balzac à Mme Hanska
Janvier 1834
Honoré de Balzac vit à Paris où, un beau jour, il reçoit d'Odessa une lettre
admirative signée « L'Étrangère ». La mystérieuse correspondante écrit
notamment : « Votre génie me semble sublime mais il faut qu'il devienne
divin... Vous êtes un météore lumineux. [...] J'admire votre talent, je rends
hommage à votre âme; je voudrais être votre sœur... »
Balzac tombe aussitôt amoureux de cette lectrice enthousiaste, la comtesse
Eve Hanska. C'est le début d'une relation qui va durer dix-huit ans !
Si tu savais combien de superstitions tu me donnes. Dès que je travaille,
je mets à mon doigt le talisman, cet anneau sera à mon doigt pendant toutes
mes heures de travail, je le mets au premier doigt de la main gauche, avec
lequel je tiens mon papier, en sorte que ta pensée m'étreint, tu es là avec moi,
5 maintenant au lieu de chercher en l'air mes mots et mes idées je les demande
à cette délicieuse bague et j'y ai trouvé tout Séraphita'.
Amour céleste, que de choses j'ai à te dire, et pour lesquelles il faudrait les
saintes heures pendant lesquelles le cœur sent le besoin de se mettre à nu. Les
adorables plaisirs de l'amour ne sont que les moyens d'arriver à cette union,
10 cette fusion des âmes. Chère, avec quelle joie, je vois mes fortunes de cœur,
et le sort de mon âme assurés. Oui, je t'aimerai, seule et unique dans toute ma
vie. Tu as tout ce qui me plaît. Tu exhales pour moi le parfum le plus enivrant
qu'une femme puisse avoir, cela seul est un trésor d'amour. Je t'aime avec un
fanatisme qui n'exclut pas cette ravissante quiétude d'un amour sans orages
15 possibles. Oui, dis-toi bien que je respire par l'air que tu aspires, que je ne puis
jamais avoir d'autre pensée que toi. Tu es la fin de tout pour moi. [...]
De là, le nouveau courage que je me sens contre mes dernières adversités².
Je voudrais être plus grand, être quelque chose de glorieux pour que la cou-
ronne à poser sur ta tête fût la plus feuillue, la plus fleurie, de toutes celles
20 qu'ont noblement gagnées les grands hommes.
N'aie donc jamais ni défiance, ni crainte ; il n'y a pas d'abîmes dans les cieux.
Mille baisers pleins de caresses, mille caresses pleines de baisers. Mon Dieu,
ne pourrais-je donc jamais te faire bien voir combien je t'aime, toi, mon Eve.​

Sagot :

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