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Un régime perverti au service
des plus méchants
Un oligarque de la tyrannie des Trente, peut-être Critias, écrit à
la fin du v siècle, dans un pamphlet anonyme, tout le mal qu'il
pense de la démocratie.
«<
En ce qui concerne le régime des Athéniens, je ne les
approuve pas d'avoir choisi le comportement politique
qu'implique ce régime; la raison en est que, par ce choix,
ils ont choisi l'intérêt des méchants plutôt que celui des
honnêtes gens; voilà exactement ce que je n'approuve pas.
[...]
Ce que je tiens à dire, dès le début, c'est qu'il paraît juste
qu'à Athènes les pauvres et le peuple l'emportent sur les
nobles et les riches, car c'est le peuple qui fait naviguer les
vaisseaux de guerre et qui donne à la cité sa puissance, car
ce sont les pilotes, les chefs de nage, les maîtres d'équipage
en second, les vigies de la proue, les constructeurs de navires
qui font la puissance de la cité, beaucoup plus que les
hoplites, les nobles et les honnêtes gens. Donc, puisqu'il
en est ainsi, il paraît juste que tout le monde participe aux
magistratures, par tirage au sort et élection et que la parole
soit accordée à tout citoyen qui la demande. >>
Vieil oligarque, Constitution des Athéniens,
fin du Ve siècle av. J.-C., trad. C. Leduc.
2 Les dysfonctionnements de la démocratie
Dicéopolis vient de la campagne pour se rendre à l'Assemblée et réclamer
la paix. Il dénonce les destructions de récolte provoquées par la guerre.
<
était convoquée pour l'aurore, de trouver la Pnyx¹ vide, comme
vous voyez. Le peuple bavarde sur l'Agora, et pêle-mêle fuit devant
la corde vermillonnée². Les Prytanes [membres du Conseil] mêmes
ne sont pas là, mais arriveront en retard, et ensuite se bousculeront
l'un l'autre une fois ici pour s'emparer du premier banc. [...] Mais
la paix et les moyens de la faire, c'est le cadet de leurs soucis. [...]
Je regarde au loin du côté de mon champ, amoureux que je suis
de la paix; j'ai la ville en horreur et pleure mon village. [...] Aussi
je suis venu cette fois bien décidé à crier à interrompre, à invectiver
tout orateur qui parlera d'autre chose que de paix. >>
Aristophane, Les Acharniens, 425 av. J.-C., trad. H. van Dacie.
1. Colline où se réunit l'ecclésia à Athènes.
2. Pour contraindre les citoyens à aller voter, les esclaves publics les poussaient
l'aide d'une corde vermillon.
1. Quelles sont les opinions des deux auteurs sur le régime
démocratique ? Comment l'expriment-ils?
2. Comment ces textes soulignent l'existence d'intérêts
et d'opinions contradictoires au sein de la cité?
3. Quelles sont les causes de la crise du régime athénien?