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Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai
reçu un télégramme de l'asile: « Mère décédée. Enterrement demain.
Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier.
L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres,
d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi.
Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours
de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse
pareille. Mais il n'avait pas l'air content. Je lui ai même dit : "Ce n'est pas de
ma faute." Il n'a pas répondu. J'ai pensé alors que je n'aurais pas dû lui dire
10 cela. En somme, je n'avais pas à m'excuser. C'était plutôt à lui de me
présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il
me verra en deuil. Pour le moment, c'est un peu comme si maman n'était pas
morte. Après l'enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout
aura revêtu une allure plus officielle.
J'ai pris l'autobus à deux heures. Il faisait très chaud. J'ai mangé au
restaurant, chez Céleste, comme d'habitude. Ils avaient tous beaucoup de
peine pour moi et Céleste m'a dit: "On n'a qu'une mère". Quand je suis parti,
ils m'ont accompagné à la porte. J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que
je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un
20 brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.
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J'ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course,
c'est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l'odeur d'essence, à
la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J'ai dormi
pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j'étais tassé contre
un militaire qui m'a souri et qui m'a demandé si je venais de loin. J'ai dit
"oui" pour n'avoir plus à parler.

C’est un roman d’Albert Camus « l’étranger » paru en 1942


Quelqu’un pourrait m’aider pour faire l’introduction svp

Sagot :

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