mon besoin d'un garçon; pas d'une amie fille, mais d'un ami garçon. Découvert aussi le
bonheur en moi et ma cuirasse de superficialité et de gaieté. Mais de temps à autre je
retombais dans le silence. À présent je ne vis plus que pour Peter, car c'est de lui que dépendra
pour une large part ce qu'il adviendra désormais de moi !
Et le soir, lorsque je suis couchée et que je termine ma prière par ces mots : « Je te remercie
pour tout ce qui est bon, aimable et beau », alors je me sens emplie d'une jubilation¹ intérieure,
je pense à « ce qui est bon » dans la clandestinité, dans ma santé, dans tout mon être, à « ce
qui est aimable » en Peter [...]. Alors, je ne pense pas à toute la détresse, mais à la beauté qui
subsiste encore. C'est là que réside pour une grande part la différence entre Maman et moi [...],
car que doit-on faire quand on connaît soi-même la détresse ? On est perdu. En revanche, je
trouve que dans n'importe quel chagrin, il subsiste quelque chose de beau, si on le regarde, on
est frappé par la présence d'une joie de plus en plus forte et l'on retrouve soi-même son
équilibre. Et qui est heureux rendra les autres heureux aussi, qui a courage et confiance ne se
laissera jamais sombrer dans la détresse.
Bien à toi,
Anne M. Frank
Le Journal d'Anne Frank, 1947, traduit du néerlandais par Philippe Noble et Isabelle Rosselin-
Bobulesco Ⓒ Calmann-Lévy, 2002.
1. Grande joie.
Compréhension : Sur ton cahier, réponds aux questions suivantes.
1. En quelques phrases, dressez le portrait d'Anne Frank en 1942. À quoi était-elle très
attachée ?
2. Établissez le portrait qu'Anne Frank fait d'elle-même en mars 1944.
3. Qu'est-ce qui a provoqué ce changement ?
4. « C'est une chance qu'au milieu, au point culminant de la fête, j'aie été soudain ramenée à la
réalité. » (l. 8-9) Que veut dire Anne Frank selon vous ?