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Sagot :
Bonjour
Ce n’est pas parce que les autres prétendent quelque chose que c’est forcément vrai ; et de même ce n’est pas parce que moi je prétends quelque chose que c’est forcément vrai. Pour juger de la part de vérité et de sottise que renferme chaque idée, il faut prendre du recul, s’en détacher et cesser d’y croire. Et cela vaut à l’égard de toute idée, d’où qu’elle vienne. Le problème tourne en fait autour de l’idée de vérité. Si on se soucie vraiment de la vérité de nos idées, on ne peut plus se permettre de faire comme si nous avions un rapport privilégié avec la vérité, comme si la vérité nous appartenait en propre ; les autres y ont eux aussi un accès et ils en sont peut-être plus proches que nous. Ce n’est pas sûr mais il faut au moins se poser la question. C’est pourquoi Socrate cherchait constamment l’approbation des autres dans la discussion. Si ce qu’il disait était bien vrai, cela ne pouvait être vrai que pour lui ; il fallait bien qu’à force de réflexion personnelle les autres en conviennent aussi.
Toutes ces remarques nous amènent à mieux cerner ce que veut dire penser par "soi-même". Cela ne veut pas dire penser ce qui nous plait tout seul dans son coin et mépriser toutes les objections, toutes les idées différentes des nôtres. Refuser d’envisager une autre manière de voir les choses, ce n’est pas un signe de puissance intellectuelle. C’est bien plutôt un signe qu’on arrête de penser, qu’on arrête de penser pour de bon. Penser par soi-même cela veut dire rechercher la vérité avec un esprit critique. Ce qui signifie : se demander si nos idées sont vraies ou si nous y croyons tout simplement parce que c’est ce que nous avons toujours pensé sans vraiment s’être posé de question ; se demander si nos idées suffisent vraiment pour comprendre les choses. Cela signifie aussi : se demander si les idées des autres qui nous déplaisent ou qui nous choquent n’ont pas une part de vérité… Penser par soi-même, c’est donc penser en essayant de se débarrasser des préjugés, sans tomber dans la facilité. Croire aveuglément ce que disent les autres, c’est trop facile ; mais n’accorder de valeur qu’à nos idées, croire ce qui nous plaît, c’est encore une facilité parmi d’autres, une forme de paresse intellectuelle.
Celui qui est incapable de réfléchir sur d’autres idées que les siennes, qui n’a pas la moindre ouverture d’esprit, celui-là pense comme un enfant. Il n’a pas encore une réelle maturité d’esprit et il ne pense pas encore par lui-même. Il ne voit pas pour l’instant qu’il y a une différence entre penser par les autres (s’en soucier pour s’y soumettre) et penser avec les autres (s’en soucier pour la plus grande liberté d’esprit qu’ils peuvent apporter).
Ce qui nous permet de préciser encore : penser par soi-même ce n’est pas donné ; c’est une manière de réfléchir qui est à développer, à acquérir peu à peu grâce au contact des autres.
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